Fitch Abaisse la Note de la Tunisie à CCC-: les raisons de cette décision

L'agence de notation souligne l'incertitude entourant la capacité de la Tunisie à mobiliser suffisamment de financements pour répondre à ses besoins.
Published on June 10, 2023, 7:29 a.m.

L’essentiel

  • Fitch Ratings a abaissé la note de défaut de l'émetteur à long terme de la Tunisie, soulignant des défis économiques majeurs auxquels le pays est confronté.
  • Parmi ces défis, on compte des besoins élevés de financement du gouvernement, un déficit important et une trajectoire de dette très sensible aux chocs fiscaux et aux taux de change.
  • Ces défis nécessitent des réformes économiques significatives et une gestion plus efficace des finances publiques pour stabiliser l'économie et assurer un avenir plus prospère pour tous les Tunisiens.


L'agence de notation Fitch Ratings a abaissé la note de défaut de l'émetteur à long terme en devises étrangères (IDR) de la Tunisie de CCC+ à CCC-, mettant en évidence une série de défis économiques auxquels le pays est confronté.

Fitch a justifié cette dégradation par plusieurs facteurs clés. Premièrement, un risque de financement accru. L'agence de notation souligne l'incertitude entourant la capacité de la Tunisie à mobiliser suffisamment de financements pour répondre à ses besoins considérables. Ce défi est exacerbé par l'échec à mettre en œuvre les actions préalables convenues pour un programme avec le Fonds monétaire international (FMI), une étape nécessaire pour débloquer les financements bilatéraux associés qui soutenaient le plan de financement de la Tunisie.

Les besoins élevés de financement du gouvernement sont un autre facteur de préoccupation. Fitch prévoit que ces besoins seront d'environ 16% du PIB en 2023 (soit environ 7,7 milliards de dollars) et 14% du PIB en 2024 (7,4 milliards de dollars), des chiffres bien supérieurs à la moyenne de 9% enregistrée entre 2015 et 2019, et parmi les plus élevés des pays notés 'C'/'D'.

L'agence s'attend également à une réduction du déficit du compte courant à 7% du PIB en 2023 et à 6,5% en 2024, contre 8,5% en 2022. Cependant, malgré cette amélioration, le déficit encore important créera près de 3,5 milliards de dollars de besoins de financement extérieur en 2023 et 2024, mettant davantage de pression sur les finances du pays.

L'agence prévoit également une réduction du déficit budgétaire à 5,8% du PIB en 2023 et 4,5% en 2024, contre 6,9% en 2022. Cependant, le progrès sur le front des réformes reste bloqué, ce qui empêche la réduction des vulnérabilités budgétaires face aux chocs.

En ce qui concerne la dette, Fitch s'attend à ce qu'elle atteigne un pic de 80,9% en 2023, contre 79,4% en 2022, et diminue à 77,3% en 2024, à condition que le chemin de la réforme fiscale ne soit pas déraillé. La trajectoire de la dette reste cependant très sensible aux chocs fiscaux et au taux de change, ce dernier pouvant constituer une source de pression en cas de retards prolongés dans l'obtention de financements externes.

Enfin, les perspectives de croissance sont défavorables. Fitch prévoit un ralentissement de la croissance du PIB à 1,4% en 2023, contre 2,4% en 2022, en raison de l'inflation toujours élevée, d'un mix de politiques plus serré en réponse aux déséquilibres macroéconomiques et budgétaires, d'une faible croissance enEurope (principal partenaire commercial de la Tunisie), d'un haut niveau d'incertitude concernant l'orientation des réformes et de l'économie, et de conditions météorologiques défavorables impactant le secteur agricole.

L'ensemble de ces facteurs souligne l'ampleur des défis auxquels la Tunisie est confrontée et les implications profondes de la décision de Fitch pour l'avenir économique du pays. Pour surmonter ces défis, la Tunisie devra probablement s'engager dans un processus de réformes économiques difficiles, renforcer la gestion de ses finances publiques et créer un environnement plus favorable pour les investissements.