Depuis l'entrée en vigueur de la loi organique du budget le 13 février 2019, la gestion publique en Tunisie a connu une transformation majeure, marquée par des changements significatifs dans les mécanismes de contrôle et d'évaluation. Cette législation a ouvert de nouvelles perspectives, alignées avec les principes d'une gestion budgétaire axée sur les objectifs. Un chapitre dédié au renforcement des procédures de contrôle a été ainsi instauré, jetant les bases d'une surveillance renforcée des finances publiques et de la gestion de l'État.
Ce dispositif de contrôle englobe de manière diligente les aspects administratifs ainsi que les critères de performance. L'article 63 de la loi exprime sans équivoque son intention de soumettre le budget de l'État à un examen administratif minutieux, en cohérence avec les étapes successives de sa mise en œuvre. Des directives précises régiront ces démarches de surveillance, élaborées spécifiquement pour chaque organe de supervision.
À travers ces nouvelles directives, les organes de l'administration publique ont été soumis à des audits ciblés, tandis que les projets et les rapports annuels de performance font l'objet d'une évaluation approfondie.
Parallèlement, l'article 64 prévoit une évaluation a posteriori du budget, confiée à la Cour des Comptes en tant que gardienne de ce processus. Cet organe essentiel émet des observations précises, détaillées mission par mission et programme par programme, donnant une portée concrète à cet exercice de contrôle.
Cependant, alors que les fondements de la gestion publique évoluent constamment, il est crucial d'ajuster ces mécanismes de contrôle pour qu'ils reflètent avec justesse les nouvelles méthodes et les enjeux contemporains. Si ce mécanisme a démontré son efficacité dans le contexte d'une gestion traditionnelle axée sur la conformité, l'efficacité et la qualité des actions publiques exigent une adaptation.
Dans cette quête de réforme, une analyse minutieuse s'avère nécessaire pour démêler les avantages et les vulnérabilités du système en place. C'est dans cet esprit que l'Unité de Gestion du budget par objectifs au sein du ministère des finances a entrepris une évaluation approfondie, en collaboration avec Expertise France. Une initiative visant à explorer les perspectives de l'introduction d'un système d'audit interne au sein de l'appareil administratif tunisien.
Expertise pluridisciplinaire et présence sur l’ensemble du processus
L'une des principales forces du système de contrôle en Tunisie réside dans sa portée exhaustive qui englobe l'ensemble du processus, depuis l'engagement jusqu'au paiement. Cette démarche globale permet de garantir une surveillance complète et minutieuse des dépenses publiques, assurant ainsi la transparence et la responsabilité.
Un autre aspect favorable est la séparation des responsabilités clairement établie entre les ordonnateurs et les comptables. Cette division des tâches contribue à maintenir une gestion équilibrée et réduire les risques de mauvaise utilisation des fonds publics.
Le dispositif de contrôle se distingue également par sa vigilance accrue en matière de conformité et de régularité. Les contrôles rigoureux garantissent que les actions menées sont en accord avec les normes et les régulations en vigueur, renforçant ainsi la crédibilité des actions gouvernementales.
L'expertise pluridisciplinaire des contrôleurs et des inspecteurs constitue un atout majeur. Leurs compétences variées et complémentaires permettent d'évaluer de manière holistique les différents aspects des opérations gouvernementales.
La disponibilité de guides et de manuels de procédures spécifiques facilite grandement la réalisation des contrôles et des audits. Ces ressources précieuses, tels que le guide de vérification des services publics et le manuel des procédures pour le recensement des biens mobiliers, contribuent à une exécution plus efficace des activités de contrôle.
Enfin, les inspecteurs possèdent une connaissance approfondie des politiques publiques et de l'organisation administrative. Cette compréhension profonde leur permet d'évaluer de manière informée les actions gouvernementales, améliorant ainsi la pertinence des contrôles.
Faible coordination et partage limité d’expériences
Malgré ces forces, le système de contrôle tunisien est confronté à plusieurs défis importants. Tout d'abord, un manque d'effectifs au sein des instances de contrôle limite leur capacité à mener des évaluations exhaustives. Cette contrainte entrave l'efficacité globale du système.
Les interférences entre les différentes instances de contrôle et d'audit génèrent une perte d'efficacité et sapent la cohérence des efforts. Cette situation souligne le besoin de coordination et de collaboration plus étroite entre ces organismes.
La multiplicité des intervenants impliqués dans les activités de contrôle peut engendrer une confusion quant aux responsabilités et aux résultats attendus. Cette complexité nuit à la clarté du processus.
La coordination insuffisante entre les différentes instances de contrôle crée des lacunes et un manque de complémentarité dans les efforts de surveillance. De plus, la répétition des contrôles aboutit à des coûts supplémentaires sans garantie d'élimination des déficiences.
Le partage limité d'expériences et de méthodes d'investigation entre les instances de contrôle et les inspections départementales entrave la progression collective et la diffusion des meilleures pratiques.
Par ailleurs, le système actuel de contrôle et d'audit ne répond pas toujours aux normes professionnelles de l'audit interne, ce qui peut affecter son efficacité et son impartialité.